Visite pastorale de la Cathédrale de Saint-Jean-de-Maurienne
Le vingt-six novembre mille sept cent cinquante-six Mgr de Rosignan, évêque de Maurienne fait la visite pastorale de sa cathédrale. Cette visite a longtemps été reportée en raison de l’occupation de la Maurienne par les Espagnols et des mauvaises relations entre l’évêque et son clergé. Le matin, le prélat, revêtu de ses habits pontificaux, quitte son palais épiscopal, où ses chanoines « revêtus de leurs pluviaux solennels, les bénéficiers et enfants de chœur revêtus de leur surplis sont venus en prendre possession », traverse la place de la cathédrale, alors cimetière de la paroisse Notre-Dame, pour se rendre à la cathédrale.
Au cours de cette visite, l’évêque va décrire minutieusement chaque partie du bâtiment tel qu’il était en 1753, en contrôler l’état, vérifier son entretien, s’assurer que les reliques gardées dans la salle du trésor sont bien pourvues de leur authentique, que les règles liturgiques sont bien respectées. Lorsqu’il estimera qu’une modification doit être apportée, il publiera une ordonnance. A cette époque, le Saint Sacrement est conservé dans le ciborium placé sur la façade du Sancta Sanctorum du côté de l’évangile. En application des décisions prises au concile de Trente (1545-1563), Mgr de Rosignan exige dans sa huitième ordonnance que dans les six mois, un tabernacle soit placé sur le maître-autel pour y recevoir le Saint Sacrement. Il interdira également dans sa seizième ordonnance, que l’on continue à enterrer sur la place de la cathédrale ou dans le cloitre « parce qu’on y voit quantité d’ossements de morts qu’on laisse hors de terre en en ensevelissant d’autres ». L’évêque continue sa visite par le quartier canonical. Les maisons des chanoines sont décrites, la situation géographique, le nom de la maison, celui de l’occupant avec son statut dans la hiérarchie des chanoines sont précisés. Les lettres d’ordre, permissions, les revenus et biens personnels de chaque chanoine sont enregistrés. Les statuts, les archives de la cathédrale et du chapitre sont vérifiés.
L’évêque décide enfin de modifier l’organisation d’une des plus anciennes coutumes du chapitre, le banquet muet. Lors de la nomination d’un prêtre au canonicat, ou lors du changement de statut dans la hiérarchie d’un chanoine la coutume consistait à donner une somme d’argent au chapitre, un banquet aux autres chanoines et une aumône aux pauvres de la paroisse. L’évêque remplace ces différentes donations en une seule au profit de la fabrique, ce qui évitera que les sommes données « ne puissent être taxées du procès de simonie. » Les chanoines du chapitre contesteront devant l’official de Vienne les dispositions prises durant cette visite pastorale comme presque toutes les décisions de leur évêque. Le tribunal leur donnera tort. Ils seront même condamnés aux dépens pour appel abusif.
Cette visite pastorale constitue un document particulièrement intéressant pour la connaissance de l’architecture de la cathédrale avant les transformations exécutées en 1771, pour celle la vie du chapitre ainsi que sur les relations entre Mgr de Rosignan et son clergé.
Pierre Geneletti
Société d'Histoire et d'Archéologie de Maurienne
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